John Eyles, All About Jazz

Recorded live in concert, in October 1993, at Museum Bochum, during the Ruhr Jazz Festival, this album is not a reissue but is being released for the first time, its wryly amusing title indicating that it has been declared fit for public consumption. In fact, the album’s four tracks, being the only recordings of this Anglo-German quartet together, make a valuable snapshot of the four at an interesting stage of their careers. Guitarist John Russell and drummer Paul Lovens had first paired up some years earlier, in the quintet News from the Shed (completed by John Butcher, Phil Durrant and Radu Malfatti), which toured England in 1986 and continued gigging until 1994. In 1992, saxophonist Stefan Keune and bassist Hans Schneider had recorded together as two-thirds of the Stefan Keune Trio, alongside drummer Paul Lytton (not to be confused with Lovens!)

Varying in length from twenty-three minutes down to four-and-a-half across this forty-five minutes, the freely improvised tracks give all four musicians ample space to be heard. Without any apparent need for a warm-up, from the start of „Stretchers,“ the longest track and opener, all four are in full flow; Schneider and Lovens do not adopt the role of a conventional rhythm section but are afforded the freedom to roam far and wide in addition to maintaining the group’s pulse, freedom which they each seize at every opportunity, adding occasional solos, embellishments to the group sound and commentaries upon the music of their bandmates. Russell’s role is not dissimilar, occupying a crucial position between the bass & drums and Keune; his trademark guitar arpeggios and fills clearly identify this group as a quartet not a trio, an important distinction.

Unsurprisingly, the saxophonist tends to gravitate to the fore, without obviously hogging the limelight or crowding out the other three. His quick reactions and fluid playing make for thrilling listening, whether he be on tenor or sopranino. All things considered, it is all too evident why each of the four pieces here received prolonged applause from the audience at the concert. After this recording, Keune kept up links with the other three members, recording in long-standing duos both with Russell and with Lovens (see the You Tube clip below for all three together at London’s Vortex in 2012), and in a trio with Schneider plus drummer Achim Krämer. This is classic European improv at its best.


Jean-Michel van Schouwburg, Orynx improv‘ and sounds

Avec un titre aussi tiré par les cheveux, cette rencontre datant d’il y a plus de 25 ans ne présage pas d’une aussi convaincante réussite à l’écart des modèles – enregistrements déjà réalisés par deux ou voire trois des quatre compères, ici rassemblés pour la première fois. En effet, il s’agit de la toute première rencontre du guitariste John Russell et du saxophoniste Stefan Keune, ici au sopranino et au ténor. À l’époque, ce jeune nouveau-venu dans la scène improvisée venait de jouer et enregistrer avec Paul Lytton et le contrebassiste Hans Schneider, présent ici  (Loft Stefan Keune Trio/ Hybrid 3 1992). Par la suite, Russell et Keune vont collaborer étroitement et nous laisser deux magnifiques CD’s, Excerpts and Offerings/ Acta et Frequency of Use/ NurNichtNur. Paul Lovens et John Russell sont des habitués du groupe Vario du tromboniste Günther Christmann. Hans Schneider et Lytton ont joué fréquemment avec le clarinettiste basse et souffleur de sax sopranino Wolfgang Fuchs, disparu depuis. Il y a un peu de Fuchs chez Keune. Mais ne jouent-ils pas « la même musique » ?  Malgré l’acoustique réverbérante du Musée de Bochum et en dépit du professionnalisme d’Ansgar Balhorn,  preneur de sons réputé, l’enregistrement à la fois dur et caverneux de ce superbe concert ne parvient pas à altérer la fascination de cette musique improvisée collective. Elle l’amplifie même. On connaît la vélocité légendaire de Paul Lovens et l’articulation quasi evanparkerienne et la puissance mordante du sopranino de Stefan Keune et, en bonne connaissance de cause, nous nous serions attendus à une foire d’empoigne étourdissante, une cavalcade pétaradante. Mais il n’en n’est rien. Si Stefan Keune a tout le profil sonore du hard-free (cfr Evan Parker avec Schlippenbach et Lovens), les deux autres acolytes cordistes, par la nature de leurs instruments, favorisent le concept de musique de chambre, connu par les brötzmanniaques sous l’appellation « english disease ». John Russell joue exclusivement de la guitare acoustique et, à cette époque, évoluait avec John Butcher et Phil Durrant dans leur trio légendaire. Le contrebassiste Hans Schneider ne se commet jamais dans le hard free, mais privilégie la qualité de timbre et la palette sonore détaillée de son grand violon avec un superbe coup d’archet chercheur et découvreur de sonorités. Et donc, s’étale devant nous un remarquable échange improvisé où chaque improvisateur laisse aux trois autres l’espace et le temps de faire des propositions et se met à intervenir / répondre alternativement en favorisant des pauses silencieuses. Durant la première partie du concert, une longue suite de 23:13 intitulée Stretchers, le jeu du saxophoniste au sopranino est extrême dans l’aigu, chargé, vitriolique. Le guitariste joue des harmoniques pastorales ou racle méchamment  les cordes en suivant les volutes du souffleur qui dépasse ensuite la tessiture de l’instrument dans des harmoniques fantômes. Paul Lovens veille au grain avec des commentaires étouffés qui peuvent se métamorphoser très épisodiquement en une multiplication de roulements secs rendus possibles par les propriétés sonores des tambours chinois. La contrebasse ronronne entraînant les acolytes vers plus de délicatesses, dispensant des descentes graveleuses qui appellent des sons ultra aigus, crotales à l’archet du percussionniste et harmoniques extrêmes de l’anche. Subitement la séquence s’arrête dans un échange vif percussion/ sax qui enchaîne sur les tracés arachnéens forcenés du guitariste. L’aspect ludique, la fluidité et la vivacité propulsent les sons dans une tournoiement contrôlé. Stop ! Lovens atterrit sur des détails infimes grattant et frottant un woodblock éborgné et il s’ensuit des échanges en métamorphose permanente où chacun essaie avec succès de superposer des modes de jeux très différents, mais complémentaires et marqués par une forte indépendance de chacun dans l’interpénétration des sonorités individuelles. Le batteur relâche chaque fois la tension vers le quasi silence, laissant l’initiative à ses collègues qui rivalisent d’esprit d’à-propos, d’initiative et de quelques fantaisies impromptues. Après cette longue improvisation, le quartet se concentre en des échappées plus brèves et concises. Cuism dure 9:43, Drei(Trois) 4 :29 et With a big stick 6:51. La musique de Cuism atteint d’autres horizons et renouvelle l’atmosphère du concert en combinant différents ostinatos de manière retenue laissant le saxophoniste placer de remarquables doigtés fourchus. Cette séquence s’évanouit devant le jeu ténu et fantomatique de la scie musicale à l’archet auquel répondent des sons métalliques improbables de Russell. On entend poindre ci et là les lents et imperceptibles glissandos de la contrebasse, Schneider saupoudrant les options les mieux choisies dans le flux du collectif avec un goût sûr. Chaque improvisation collective a son caractère propre et distinct de la précédente rendant légitime la publication de ce document rare qui transcende allègrement sa relative qualité sonore enregistrée. Laquelle lui donne curieusement son aura magique. L’âpreté et l’urgence du jeu de Keune sont renforcées par les interventions soignées, méticuleuses et presqu’éthérées des trois autres. Quoi qu’il se passe, nous avons à affaire à une qualité d’invention, une pureté d’intention et une écoute mutuelle merveilleuses. Enregistrée à une époque où ce type d’approche sonore épurée était marginale et encore quasiment inconnue en France, Espagne, Portugal, Italie etc… enregistrements du début des années nonante à l’appui. Je songe aussi à Quintet Moderne qui réunissait Lovens Harri Sjöström, Phil Wachsmann, Teppo Hauta-aho et Paul Rutherford (Ikkunan Takaina / Bead Records). À plébisciter avec insistance. Surclasse de nombreux enregistrements récents.

Rigobert Dittmann, Bad Alchemy #105

Keune – Russell, Keune – Schneider, Keune – Lovens, das geht seit vielen Jahren gut zusammen. Und das nicht einfach so, denn mit dem Leverkusener Hans Schneider am King_Übü-Bass & Paul Lytton an den Drums hatte der Oberhausener Sopranino- & Tenorsaxer schon Anfang der 90er das Stefan Keune Trio gebildet. Da war er 26, aber schon ganz dem Imp(ro) of the Perverse verfallen. Das 1993 etablierte Quartett mit dem Saitenkratzer Russell und dem ewig beschlipsten Plink’n’Roller Paul Lovens zeigt ebenso wie sein Spiel mit Lytton den Wert, den Keune auf englische Neologismen legte und immer noch legt: im Trio mit Dominic Lash & Steve Noble, in Xpact mit Erhard Hirt und wieder Schneider & Lytton. Wobei der Wider-Geist und Teufel der Verkehrtheit, der auch am 10.10.1993 das Spiel im Museum Bochum beherrschte, sich als ’nothing particularly horrible‘ präsentiert. Vom Horror vacui, der einst die Welt plenistisch zusammenhielt, blieb nur die ’negative Lust‘ an der Creatio ex nihilo, die Lust furchtloser Vakuisten, als die sie sich mit ‚Cuism‘ verraten, am Jonglieren mit infinitesimaler Fülle und unendlicher Leere. Auch in der dünnen Bochumer Luft finden sie Gottesteilchen, die sie keckernd zum Teufel jagen, Klangpartikel, die sie trillernd zerstäuben, spalten oder so dünn ziehen, dass sie quietschen. Lovens hackt und zerpoingt Blech, tockelt und spreißelt Holz. Russell harft und zerpflückt Draht. Schneider zerquetscht dicke Fliegen oder sägt, dass es singt. Und mittendrin im Bochumer Schrott, Keune als kreischendes, zirpendes, krähendes Metallpartikelfüllhorn, als schillernder Schwarm, rostiger Rotz, spitzer Strahl. ‚Cuism‘ ist eine delikat getupfte, transparente Geräuschwolke, und Lovens lässt da tatsächlich eine Singende Säge jaulen. Bei ‚Drei‘ dominieren wieder turbulente Schüttungen, krawallige Kollisionen, knurpsige und klopfende Action, raue Reibung, Spitfire, dass die Luft brennt. Bei ‚With a big stick‘ zirpt Russell wie mit Angelschnur, Lovens lässt Rattenpfoten rappeln und huschen, der Bassbogen flageolettisiert und hüpft, das Soprano pfeift und spotzt. Auch piano und pianissimo und natürlich um Luftlöcher herum, an deren prekären Rändern sich das Ganze ja abspielt. Keune (über)lebt – es könnte schlimmer sein – als Bibliothekar. Denn um den Homo ludens herum wachsen die Luftlöcher.

Stuart Broomer, Free Jazz Blog

I have been writing in one form or another about improvised music of one form or another off and on for 56 years and one of the thing that keeps me coming back to the process is that I find myself knowing less and less about it every time I encounter it at one of its highest levels, such as the music that’s heard here, and that a knowing wholly nothing might ultimately arrive as the precondition for hearing whole, beatifically bereft of the intercession of language, thus a knowing nothing that seeks insistently to know less, to name less, to become unwriting. The longer I listen I question further the value of absolutes in any area of human or alien study or endeavour, wonder about such dubious concepts that might be applied such as “pure” or “absolute” or “original” or “form” or “something.”

Nothing Particularly Horrible may be as “pure” as improvising music gets, something I hope might indicate the clarity and immediacy of its relation to time, improvised music of this quality representing as immediate a representation of the relationship to time as we might experience. But that notion of “pure” might well be something else, “imitation” or “ruse” or some sinister effort to represent the idea of immediacy, a crafty imitation of presence, of the moment; that is, something as palpably false as an audio tape some 27 years old, its contents only an ideal representation of a fully occupied, otherwise inconceivable, 44 minutes in Bochum.

And yet this imitation of the moment is compelling, so subtle, so perfect. There’s a collection of sounds here, sounds that line up with the personnel described, sounds that can be attributed to Stefan Keune’s sopranino and tenor saxophones, John Russell’s acoustic guitar, Hans Schneider’s bass and Paul Lovens’ drum set, cymbals, gongs and musical saw (the latter, perhaps, an irrepressible companion to the Holy See, like Sancho Panza to Don Quixote). While much wood is present in those instruments, the dominant sound is metal—horn, strings, frets, gongs, cymbals; the dominant form the circle: the cylindrical bore of the saxophones; the cross-sections of guitar and bass strings, the arc of a guitar’s fret wire; the circular shells of drums and drum heads, gongs, the cross-sections of sticks. Movements in time include arcs, large and small, whether detailed and fragmentary or vast and imaginary (descriptors to be recombined and replaced at will), arcs that suggest infinities of both scale (macro and micro) and number, a universe of arcs that exist within and stretch outward from the music’s instants.

There is a sense of the continuous line here, but it’s a shared line, the musicians’ common pursuit. There are moments‒even whole minutes‒ when individuals only have to be listening intently, absolutely, and reacting instantly‒for sub-sections of seconds, just absolutely conscious enough‒to inventively continue the shard of another musician that must become a collective spontaneous arc, as if the four have met to inscribe a line that is a complete expression of itself. If there were only that line here, it might be enough, might suffice, but there’s much, much more. Sometimes the brief sounds accumulate, clamber over one another, perhaps seeking warmth and intimacy with that sound just over there; they become individually more complex, richer in overtones, in jolts and kinks, making sharp bends in their own arcs as they twist outward to other meanings, forcing different shapes of response, mimicking or prefiguring all the creative or merely self aggrandizing processes of biology, chemistry and physics.

It’s music for which one gives thanks, music that cannot even be repeated on our handy machines without first being lost, reconfigured, reinvented and born anew.